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La zone de confort
Il était temps que j’aborde avec mes propres mots ce thème qui me tient tant à cœur, celui de la zone de confort. Je tenterai de vous le partager avec le plus de simplicité possible pour que vous puissiez vraiment vous approprier cette ‘’théorie’’ et que cela vous facilite sa mise en pratique dans votre quotidien.
Attention : quand je dis avec mes mots, je dis avec les mots d’une nana qui adore comprendre, lire des thèses et des articles, mais qui n’est pas la meilleure pote des sciences et du vocabulaire qui va avec. Autant vous dire qu’ici plus qu’ailleurs, je vais écrire comme je parle ! Et je clos ainsi le petit message de warning : toute vulgarisation mérite d'être approfondie si le sujet vous intéresse d'avantage. Mes MP restent ouverts si vous avez besoin de lectures ou... Google Scholar !
Bon, on commence ?
Une fois n’est pas coutume, avant de tenter d'expliquer le pourquoi du comment, je vous donne la définition pure et dure de cette zone avec en prime un petit schéma des familles qui fait toujours plaisir, on ne va pas se le cacher !
Voici un petit schéma du site de : https://www.delatruffeauxsabots.fr/la-zone-de-confort-du-chien/ qui est super trop bien pour que je ne le partage pas !
Ok, maintenant que vous avez cette superbe image : quel intérêt ? quel rapport avec les émotions ? De toutes façons, des émotions c’est un truc encombrant qui ne nous sert à rien parce que sans émotion on est beaucoup plus performants, non ? C’est un truc pour les faibles c’est ça ?
Si on vous dit de respecter cette zone de confort, pour apprendre à votre chien à agir différemment, c’est en rapport avec la prise de décision. Aujourd’hui, nous savons que tout comportement est sous-tendu par une charge émotionnelle. L’idée si l’on veut que ce comportement change, c’est que le chien (ou la personne ?) apprenne à faire un choix différent.
Et comment on apprend à faire un choix différent ? D’abord, il faut comprendre comment on apprend à faire un choix tout court.
Là, y’a John Marschall Reeve qui rentre en jeu et qui parle des fonctions des émotions (pas si inutiles que ça, donc) :
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La fonction adaptative : préparer l’organisme à agir
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La fonction motivationnelle : émotion et motivation sont étroitement corrélées et ‘’bidirectionnelles’’ : elles s’alimentent toutes les deux. Si je ressens une émotion positive, je serai + motivée à revivre cette expérience. Au contraire, si j’y ressens une émotion négative, je devrai – y être motivée… et inversement !
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La fonction sociale : communiquer et partager notre état émotionnel. Si l’émotion vous est communiquée, cela a un but, celui d’être entendu. Ne faisons pas comme si elle n’existait pas… c’est une forme d’appel à soutien !
Damasio (qui, nous pourrons nous mettre d’accord là-dessus, est clairement un des couteaux les plus aiguisé du tiroir ‘’émotion et cognition’’) parle également de l’impact des émotions dans la prise de décision. Il va même plus loin : raison et émotion ne s’opposent pas, les émotions influencent significativement la prise de décision par des marqueurs somatiques formés des traces de nos expériences émotionnelles passées.
Bon, tout ça pour dire : on sait de manière plutôt certaine que les émotions ont un impact très important dans la prise de décision. Top.
Au niveau émotionnel, on obtient donc un schéma du genre (simplifié) :
Et en fait, même si c’est simplifié, voilà par quoi toute l’information qu’on reçoit passe pour qu’on puisse, à la fin, prendre une décision.
Ça en fait un itinéraire hein ! J’imagine qu’avec cette petite mise en gueule, vous comprenez mieux pourquoi ‘’Rhoo, ça prend du temps, je veux que ça aille plus vite !’’. Ouais, ben y’a tout ça à revoir, si on veut apprendre à réagir et agir différemment !
Maintenant que tout ça est partagé, vous comprenez peut-être (je l’espère) un peu mieux tout ce qui sous-tend ce circuit émotionnel et donc la prise de décision, et je vais vous aider à faire le lien avec la zone de confort (enfin !).
Si je veux parler grossièrement et de manière imagée, c’est un peu comme s’il y avait deux gros blocs qui s’occupent du traitement de cette info émotionnelle : un bloc plutôt émotionnel et un bloc plutôt rationnel.
Petit désavantage pour l’équipe rationnelle : quand l’émotion prend le dessus, la raison peine à travailler. C’est exactement pour ça que :
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Quand je sors de la douche cheveux mouillés sur mon épaule, je hurle et me tape contre un mur en pensant que c’est une araignée
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Un chien pris de peur peut s’enfuir et finir sous un bus qu’il n’aura même pas vu, pourtant difficile rationnellement de ne pas voir un bus
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Et d’autres exemples qui je suis sure, vous viennent en tête, de quand l’émotion prend le dessus et nous fait perdre pieds.
Si moi, petite humaine, je souhaite aider mon chien à changer cela… Voyons le sous forme de jauge, comme dans les jeux vidéo. Une jauge émotionnelle, et une jauge rationnelle. Et bien, la stratégie ça va être de :
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Maintenir la jauge émotionnelle au plus bas pour
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Pouvoir muscler et nourrir la partie rationnelle, de réflexion : et apprendre ainsi de nouveaux comportements !
Sous l’émotion, rien ne pourra être modifié. Tout est même… consolidé.
Pour vous expliquer ça rapidos, mieux vaut parler de neuroplasticité : la capacité du cerveau à s’adapter tout au long de la vie, pour créer, défaire et réorganiser ses réseaux de neurones. Faut le voir comme une carte routière : à chaque fois qu’on emprunte une route, elle se consolide. Dès qu’on agit, ressent ou pense d’une manière, la route se consolide.
L’idée du travail va être de pouvoir donc emprunter une nouvelle route, et la renforcer à fond pour qu’elle devienne la connexion la plus rapide, simple, habituelle de notre cerveau.
Pssssst : ‘’toute la vie’’ en souligné ça veut dire qu’on n’est pas foutu si le chien il a déjà 3 ans hein ! Même 8, 10, ou 590 ans !
Et c’est pour cette même raison que le travail de modification comportementale est LONG… ça prend du temps de créer de nouvelles routes, bon sang de bon soir ! Arrêtons donc de croire certains qui vous vendent du rêve avec un changement du tout au tout en 3 jours. No way !
BON MAIS QUEL RAPPORT AVEC LA ZONE DE CONFORT DU CHIEN ?
Bah, si vous reprenez mon petit schéma du début, le but c’est de pouvoir préserver l’émotion au plus bas en… Gérant la distance.
La distance, c’est aussi l’activation de mon réseau habituel. Je gère l’intensité d’activation du circuit habituel, pour l’avoir à très basse intensité et commencer dès la racine à… prendre un autre chemin !
Et si j’étends ce raisonnement, c’est pourquoi gérer l’environnement est la clé de tout travail comportemental.
Dis avec d’autres mots : tout comportement découle d'une émotion. Donc si je veux changer un comportement, il faut que je m'attaque d'abord à l'émotion qui le sous-tend.
Sauf que si mon émotion m’empêche de réfléchir correctement... Pour pouvoir garder la tête froide, je vais garder mes émotions au plus bas. Pour garder mes émotions au plus bas, je vais mettre à distance ce qui suscite mon émotion, et commencer en le voyant de biiiieeeeen loin à réfléchir à comment agir autrement.
Et pour finir tout ça… comment on sait que le nouveau comportement est vraiment appris ? Avec cette réponse, je répondrais aussi à pourquoi les punitions ne sont pas utiles dans la modification comportementale.
Je sais que le comportement est appris et acquis, en somme, je sais quand ma route devient de + en + importante quand… mon chien l’empreinte de + en +. Mon chien prend de plus en plus cette décision, plus souvent, plus rapidement, face à différents niveaux de difficulté et… qu’il généralise ce comportement.
Exactement là où la punition ne nous emmène pas. Les récentes études sur la punition nous apprennent que ce n’est pas une stratégie durable, même si elle présente des effets immédiats parce qu’en punissant le chien ne généralise pas, elle fonctionne que si la personne qui puni est présente, les effets s’estompent si on arrête de punir, et… on finit par s’y habituer, à la punition.
Je me permets de faire ainsi un lien entre désensibilisation, habituation et immersion : là où, en respectant la zone de confort / les paliers je me trouve dans la désensibilisation ou l’habituation à un stimulus, au contraire, en ne les respectant pas, je me situe dans une immersion. Je fais exploser cette jauge émotionnelle.
C’est la différence entre :
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Je crains les araignées, j’apprends à en voir d’abord en photo, puis 1 en vrai à 6 kms, puis 1 en vrai à 5 kms, puis….
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Je crains les araignées, on me balance dans une pièce remplie de mygales. M’voyez la diff ?
Petit warning : quand une émotion explose, cela ne fait pas forcément du bruit… d’où le principe de détresse acquise. La détresse acquise, c’est un mécanisme de survie qui enclenche un calme relatif voir complet, un peu comme la sidération : le chien ne dit rien / ne fait rien, mais cela ne veut pas dire qu’il est à l’aise.
Petit article d’une super collègue là-dessus en cadeau (c’est Noël ouais) : https://hund.fr/actualites/limmersion-est-differente-de-lhabituation/188/
Continuons un peu ! (Oui promis, je me tais bientôt)
Cette zone de confort est donc étroitement liée à nos émotions. Et nos émotions, elles varient. C’est pourquoi la zone de confort de notre chien aussi, varie, et votre meilleur allié contre ces variations va être d’apprendre à connaître votre chien.
- Quand il est fatigué, il va moins réagir, mais cela ne veut pas dire que ça ne l’a pas impacté
- Il croise les chiens à 15m facilement, c’est sa zone verte. Mais quand on a fiat un croisement difficile, le prochain, il a besoin de + d’espace encore : sa zone sera alors à 20m.
- Pour les chats, c’est 10m, pour les humains, il a besoin de 25m.
- En vacances, la zone s’étend, il est détendu. À la maison, même à 50m il déclenche.
La zone peut varier en fonction des situations, des environnements, des évènements passés, d’un état de santé (fatigue, douleurs, maladies, dysfonctionnements…).
À ce sujet, une récolte d’information vous sera très utiles. N’hésitez pas à tenir un petit journal de bord, cela permet de poser les idées et de contrer les mémoires à trous (comme la mienne…).
Par ailleurs, même si cet article vous parle de l’importance de gérer la zone de confort de notre chien, il arrive qu’il ne soit pas possible de la gérer. Beaucoup de choses peuvent interférer dans cette gestion et certaines qui ne sont pas de votre fait !
On peut être pris de court, ou nécessiter de grandes adaptations ou encore avoir un chien qui soit très rapidement en immersion.
Soyez aussi indulgent avec votre chien qu’avec vous… on ne peut pas toujours tout contrôler, les louper font partie de la vie et du processus. Accordez-vous des pauses, allez dans des endroits sans aucun déclencheur, et soyez aussi attentif à votre propre zone de confort !
Travaillez quand vous vous sentez en état de le faire. Quand vous n’avez pas l’envie pour une quelconque raison : passez ! On prend distance, on fait demi-tour, on choisit des environnements sans rien, des horaires vides de monde, tout, mais on se facilite la vie. Vous êtes une clé principale dans le travail !
Mieux vaut 2 croisements réussis dans 1 mois, que 16 croisements dans 1 mois dont 14 catastrophiques. Comment dit-on déjà, le trop est l’ennemi du bien… ?
Pour appuyer ça, je vous partage aussi ce petit visuel de ‘’Pet Harmony Training’’ que j’ai rapidement traduis, sur les attentes VS la réalité du processus de modification comportementale…
Pour clore cet écrit, je vais copier-coller un post & visuel (traduis) de @thewondruswillow sur Instagram qui me semble très important… mais qui risque de faire grincer quelques dents. Qu’à cela ne tienne, je suis ouverte aux discussions, et pour cela, j’expose mon avis !
‘’ "Éliminez tout problème de santé avant de commencer l'entraînement."
Nous l'avons tous entendu ! C'est tellement important ! Mais voilà : la santé mentale est la santé.
Ce n'est pas un secret, nous avons été très ouverts à ce sujet, en plus de la formation de modification du comportement, nous utilisons des médicaments pour aider Willow avec son anxiété. (…)
Je pense que nous sommes tous d'accord : le cerveau est un organe de notre corps, tout comme le cœur, l'estomac, la vessie et le foie. Si vous alliez chez le vétérinaire et qu'il vous disait que votre chiot a des reflux acides mais qu'avec un simple médicament il peut vivre une vie plus confortable et normale, n'utiliseriez-vous pas ce médicament ? Les troubles de la santé mentale affectent les substances chimiques produites dans le cerveau et il existe de très nombreux médicaments qui peuvent aider votre chien à mener une vie plus confortable et plus normale. Alors pourquoi cette stigmatisation ? Pourquoi la perspective "seulement en dernier recours" ? (…)
Nous avions l'habitude de considérer les médicaments comme un dernier recours, mais nous aurions dû commencer plus tôt. Il a permis à Willow d'apprendre et d'utiliser son cerveau pour que nous puissions réellement lui apprendre des choses ! Pour que nous puissions développer de nouvelles associations positives avec le monde, sans contraintes !
Les médicaments ne sont pas la panacée. Mais elle peut être cruciale pour aider un chien à entrer dans le processus d'apprentissage avec la capacité de forger de nouvelles voies et de nouveaux souvenirs dans son cerveau ! Parlez-en à votre vétérinaire si vous pensez que votre chien a des problèmes de santé mentale. PRENEZ SOIN DE VOS ORGANES ! ‘’
Mais peut-être ce sujet méritera un écrit pour lui tout seul…
Prenez soin de vous et de vos chiens,
Bibliographie :
Van Hoorebeke, D. (2008). L'émotion et la prise de décision. Revue française de gestion, 182, 33-44.
Lotstra, F. (2002). Le cerveau émotionnel ou la neuroanatomie des émotions. Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratiques de réseaux, no29, 73-86.
Marchais-Roubelat, A. (2011). Ontologie de la décision individuelle et neurosciences : enjeux méthodologiques et épistémologiques. Management & Avenir, 43, 269-288.
https://www.ted.com/talks/antonio_damasio_the_quest_to_understand_consciousness?language=fr
Understanding motivation and emotion, Reeve John Marshall
The Interaction of Emotion and Cognition : The Relation Between the Human Amygdala and Cognitive Awareness, Elizabetg A. Phelps